J’ai trouvé quelques citations en latin pendant la traduction des Principia Mathematica du français.
AVERTISSEMENT : Je ne suis pas expert ni du latin ni d’une autre
matière quelconque. Ceci est une traduction de l’article anglais qui
porte sur les mêmes phrases latines.
Questions, commentaires et
corrections sont les bienvenues.
Une précision sur le provenance des citations qui suivront :
Elles sont des phrases latines que j’ai croisés en lisant le préface historique des Principes mathématiques de la philosophie naturelle(1759), livre traduit par la Marquise du Châtelet au milieu du XVIII^ème siècle apr. J.-C. ; ces phrases sont probablement pas traduites car Voltaire (1759), l’auteur du préface, croyait son public savant, ce qu’il a fallu être pour accéder aux dernières informations scientifiques de l’époque. Deux d’entres les citations seraient connues par les savants du XVIII^ième et la troisième — bien qu’une phrase innovée — ne sera pas moins comprise car : la Langue Latine eſt … entendue de tous les ſçavants. »1
‘Nullius in verba’
La première des phrases latines se trouve dans la résumé que M de Voltaire donne du choix de la Marquise d’étudier Newton. Il écrit qu’après avoir laisser de côté les systèmes (tels que les monads de Leibnitz, autre grand scientifique que la Marquise a étudié) elle aurait pris « pour sa règle celle de la Société Royale de Londres, Nullius in verba. ». C’est en ce faisant qu’elle se donnerait à l’étude de l’œuvre de Newton, et commencerait à l’apprécier.
Cette devise de la Société Royale — selon leur site-web (2010) — est « an expression of the determination of Fellows to withstand the domination of authority and to verify all statements by an appeal to facts determined by experiment »
Elle donne la traduction suivante :
take nobody’s word for it
Les Principia de Newton prétendent décrire les principes mathématiques du monde naturel, et ce faire en dérivant ses equations en se basant sur le moins possible des suppositions.2 La géométrie — composé des lignes droites et des cercles — et l’expérience sont les outils à partir desquels tous ces principes sont observés et prouvés. La devise de la Société Royale semble aller très facilement avec ce but, d’autant que c’est évident pourquoi Voltaire veux rapprocher cette phrase à la Marquise.
Et pourtant, la traduction n’est pas satisfaisant qu’on la regarde de plus près. Un coup d’œil au sens des mots de la devise ne semble pas corréspendre au sens que la Société lui accorde. Allons regarder le contexte de la citation et l’usage de ces mots en contexte pour en tirer la bonne signification.
La devise elle-même est tiré d’une des Epistles3 d’Horace (1929) (p.9; lignes 14–15):
nullius addictus iurare in verba magistri,
quo me cumque rapit tempestas, deferor hospes.
— Epistle 1.—À Mæcenas
Details
Il s’agit de la première des Épitres, ce qui s’addressé à Mæcenas, son patron, et dans laquelle il décrit son perspectif sur la philosophie. En s’apuyant sur plusieurs supports (voir bibliographie ci-dessous) on peut essayer d’en tiré une idée plus complète de la citation. L’ordre des mots est plus souple qu’en français4 — d’autant plus en poésie — et donc il nous faudra regarder de plus prés la déclinaison et la conjugaison de chaque mot pour comprendre la phrase entière5.
- Nullius
- genetif de nullus :
aucun, nul. - addictus
- un noun commun :
esclave pour dette, - iurare
- infinitif de verbe au présent :
jurer, faire serment - in
- préposition invariable qui s’utilise avec l’accusatif ou
l’ablatif :
dans, en, sur
- verba
- nom pluriel décliné au nominatif, au génitif, ou au vocatif :
mot, terme, expression - magistri (subst.SING.MASC.GEN)
- nom genitif singulier :
maître (d’école), celui qui commande, dirige, conduit ; chef, directeur, &c
On peut maintenant essayer de reconstruire la signification des mots selon la grammaire. Pour ce faire, on sert de la préposition pour indiquer les propositions subordonnées6, ce qui donne les gloses suivantes :
- nullius addictus iurare
- (ne suis) pas un esclave à jurer
- in verba magistri
- proposition prépositionnelle qui donne:
au paroles d’un maître quiconque
En y réfléchissant on trouve donc une proposition incomplete au sens :
sans jurer aux enseignements d’un maitre quiconque
ce qui est logique, car il n’y a pas de verbe conjugé dedans.
On peut consulter d’autres traductions en français pour vérifier notre interpretation.
L’encyclopédie Imago Mundi (Jodra 2015) donne la traduction suivante, en vers :
Ne me demande pas sous quel chef je m’enrôle
Alors que je ne crois aucun chef sur parole;
Qu’incertain voyageur sur le gouffre mouvant,
Je prends terre partout où me jette le vent :
Laquelle va droit dans le sens de la nôtre — bon signe. C’est intéressant leur choix de conjuger le verbe et de comment. De plus la réstriction du mètre poétique et de la rime demande une attention sur l’accord de plusiers lignes à la fois. Ici, l’auteur gagne des syllables en plaçant le sens combiné des mots iurare7 et addictus dans la ligne précédente : « sous quel chef je m’enrôle ».
Celle de de Lisle (1873) diffère légèrement, ce qui donne les lignes suivantes, en prose :
Si tu me demandes sous quel chef,
sous quel Dieu Lare je m’abrite,
je ne jure au nom d’aucun maître,
je m’arrête, hôte d’un moment,
partout où m’entraîne la tempête.
Details
Le TLFi donne le suivant pour /Lare/ :
- LARE
- Le plus souvent au plur. Dieux(x) lare(s) ou lare(s).
ANTIQ. ROMAINE. (Dieu) tutélaire, généralement du foyer domestique; statuette le répresantent. Lares domestiques, paternels. On plaçait les lares, les dieux lares auprès du foyer (Ac.). Il [Romulus] était pour la cité ce que le premier ancêtre était pour la famille, un Lare familier (Fustel de Coul., Cité antique,/1864, p. 177)./Servius établit des dieux lares dans chaque carrefour de la ville, dans chaque circonscription de la campagne. Ils servirent de divinités à ceux qui n’en avaient pas de naissance (Fustel de Coul., Cité antique,1864, p. 370):
1. À côté des pénates, se placent dans la demeure des lares, humbles divinités qui furent des âmes humaines, et qui, n’ayant point été souillées, ont obtenu la permission d’habiter toujours leur demeure et de veiller sur leur famille. Michelet, Hist. romaine, t. 1, 1831, p. 54.
Bien qu’il garde dans ces lignes un peu de la forme des latines, la coupure toutes les sept ou huit syllabes, il ne tente pas de reformuler le style à la française, en alexandrin vers à la rime riche des autres savants de l’époque. Cela étant Leconte de Lisle était un véritable poète, ce qui nous demande pourquoi en prose ? Il se peut, qu’il voulait mieux garder le sens originel de l’épitre.
CET ARTICLE CONTINUERA PROCHAINEMENT AVEC DEUX AUTRES CITATIONS TIRÉES DU MÊME TEXTE DE VOLTAIRE. Vous pouvez trouver le texte d’origine dans une bibliothèque ou librarie ou sur Internet. Si vous aimerez lire ma traduction en anglais du préface de Voltaire (1759) et du texte de Newton (1759), elle se trouve dans la section Projets du site.
References
de Lisle, Leconte. 1873. “À Mæcenas.” In Épitres (Horace, Leconte de Lisle), edited by Alphonse Lemerre, translated by Leconte de Lisle. Vol. 2.
Gaffiot, Félix, and Pierre Flobert. 2016. Le Gaffiot : Dictionnaire Latin-Français. Hachette-Livre. https://gaffiot.fr.
“History.” 2010. History of the Royal Society. Royal Society. https://web.archive.org/web/20130325210916/http://royalsociety.org/about-us/history/.
Horace, (Q. Horatius Flaccus). 1929. “To Mæcenas.” In Horace, Satires, Epistles and Ars Poetica, 252. H. Rushton Fairclough. London; Cambridge, Massachusetts. William Heinemann Ltd.; Harvard University Press. http://data.perseus.org/citations/urn:cts:latinLit:phi0893.phi005.perseus-lat1:1.1.
Jeanneau, Gérard, Jean-Paul Woitrain, and Jean-Claude Hassid. n.d. “Dictionnaire Latin-Français.” https://www.prima-elementa.fr/Dico.
Jodra, Serge, ed. 2015. “Epître à Mécènes.” In Imago Mundi: Encyclopédie Gratuite En Ligne, translated by inconnu. http://www.cosmovisions.com/textEpitresHorace.htm.
Lewis, Charlton T., Ph.D, and Charles Short LL.D. 1879. A Latin Dictionary. Clarendon Press, Oxford. https://latinlexicon.org/index.php.
Newton, Isaac. 1759. Principes Mathématiques de La Philosophie Naturelle. Translated by Gabrielle Emilie Le Tonnelier (Marquise du Châtelet) de Breteuil. Desaint & Saillant, rue S. Jean de Beauvais; Lambert, Parnaſſe.
Voltaire. 1759. “Préface Historique.” In Principes Mathématiques de La Philosophie Naturelle, edited by Gabrielle Emilie Le Tonnelier (Marquise du Châteler) de Breteuil, v–xiii. Desaint & Saillant.
Même s’il poursuit en écrivant qu’« il en coute toujours quelque fatigue à lire des choſes abſtraites dans une Langue étrangère. »
[^ back]Je n’aime pas particulièrement de ce paragraphe, il ne me semble pas très naturel.
[^ back]Un outil idoine est l’entrepôt de textes historiques Perseus Digital Library lequel contient le manuscrit entier des livres depuis l’Antiquité en langues classiques et comprend toutes les citations en langue latine dans cet article sauf note contraire — utilisé en accord avec les termes du license CC-BY-SA 3.0.
[^ back]À part le cas des préposition qui habituellement précede leur objet.
[^ back]La signification de chaque mot vient du dictionnaire Le Gaffiot (2016), de A Latin Dictionary (Lewis and Short 1879), et des résultats du moteur prima elementa (Jeanneau, Woitrain, and Hassid, n.d.) — j’accède à tous ses supports grace à l’outil Collatinus. Sa déclinaison vient souvent de l’outil Numen - The Latin Lexicon.
[^ back]Une préposition précede ce qu’elle décrit en latin, tel que le français.
[^ back]jurer, faire serment ; habituellement, le i s’écrit souvent j quand il a la valeur d’une voyelle, mais ce n’est pas le cas dans la phrase de Voltaire.
[^ back]